Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 juin 2007 4 21 /06 /juin /2007 15:22
simone-veil.jpgMadame la ministre, Chère Madame.  Militant socialiste, chrétien de gauche, je vous ai, Madame, toujours admiré.
Pour la courageux combat pour le droit à l’avortement que vous avez mené en 1976 contre vents et marées et contre votre propre camp – certains de vos « amis », n’hésitant pas, publiquement à l’Assemblée nationale, à vous insulter de manière ordurière, jusqu’à vous traiter de « tricoteuse » !
Pour votre combat pour la Mémoire aussi, comme en témoigne par exemple, votre soutien et votre attachement, ici à Orléans et dans le Loiret, au Centre d’études et de recherche sur les camps d’internement du Loiret (CERCIL).
J’ai même espéré, en 1986 lors de la première cohabitation, alors jeune militant, que c’est vous que François Mitterrand nommerait Premier ministre.
C’est pourquoi, au nom de l’admiration que j’ai pour vous et du respect que je vous dois, je tiens à vous faire part de mon grand étonnement pour la place que vous avez prise dans la campagne électorale de Nicolas Sarkozy.
Son discours sur la prétendue hérédité du suicide, de la pédophilie voire de l’homosexualité (porte ouverte à l’eugénisme) ou encore le sort qu’il a réservé à des centaines de femmes, d’hommes et d’enfants qui sont venus chercher asile en France : tout cela me semble tellement contraire, à l’antithèse même des valeurs que vous défendez depuis toujours.
Pourquoi, alors, avez-vous accepté de présider le comité de soutien à la candidature de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République ? La question risque de rester longtemps sans réponse. <
Partager cet article
Repost0
18 juin 2007 1 18 /06 /juin /2007 15:57
P3160008.JPG« Inchallah, la prochaine fois ». Au lendemain de second tour de la présidentielle, dans le bus n°3 qui traverse le quartier populaire de l’Argonne à Orléans, une jeune femme d’origine maghrébine, foulard sur la tête, commente ainsi à sa voisine, un brin de fatalité dans la voix, le résultat de la veille.
Car nous, la gauche, avons bel et bien perdu cette élection. Malgré une remobilisation partielle (et donc très insuffisante), au deuxième tour, d’abstentionnistes de gauche du premier tour. Dans le bureau de vote que je présidais, j’ai vu en effet revenir, le 17 juin, quelques-uns et quelques-unes de ces jeunes d’origine étrangère qui avaient fait le succès de Ségolène Royal… dans les quartiers populaires. Quelques-uns mais pas assez. Le taux de participation n’a quasiment pas augmenté entre les deux tours. Mais des électeurs de droite ne se sont pas déplacés quand des électeurs de gauche ont compris l’enjeu de cette élection. Nous avons limité la casse. Même à Orléans et malgré la victoire totale de l’UMP dans le Loiret. Par rapport à 2002, les candidats de gauche rassemblent à Orléans 5,1% de voix supplémentaires. De douze bureaux de vote majoritaires à gauche en 2002, sur les soixante que compte la ville, nous sommes passé le 17 juin à 26 ! Tout espoir est donc permis pour les municipales de 2008.
« La prochaine fois » donc.

Formidable acte civique. En attendant, des hommes et des femmes vont souffrir de la politique inégalitaire qui va être mise en place. En attendant les riches vont continuer à s’enrichir… et les pauvres à s’appauvrir.
En attendant, le pire, pour tous les militants de gauche, serait de rester les bras croisés. Nous devons absolument nous donner les moyens, pour, dès la prochaine campagne municipale, aller à la rencontre des hommes et des femmes des quartiers populaires, ceux qui sont loin des réseaux d’influence, de connaissance et d’information. Et en particulier tous ces jeunes qui ont mis tant d’espoir dans le formidable acte civique qu’ils ont accompli. Nous avons le devoir de les rencontrer, des les écouter, des les accueillir.
« Inchallah, la prochaine fois ». Il y a autant d’espoir que de résignation dans cette exclamation. Alors oui : « La prochaine fois ». Mais à nous de nous retrousser les manches. Car Dieu (Allah) n’y pourra pas grand-chose. A nous de le vouloir ! <
Partager cet article
Repost0
18 juin 2007 1 18 /06 /juin /2007 15:52

Pendant la manifestation du 12 juin 2007 (photo "20 minutes")Environ 150 personnes se sont rassemblées à Paris le 12 juin 2007 à l’initiative du collectif d’artistes Restons Vivants pour une nouvelle «fausse manifestation de droite». 
Habillés en costume cravate pour les hommes et en tailleur strict pour les femmes, comédiens et sympathisants ont défilé agitant des drapeaux tricolores ou américains et scandant des slogans ironisant sur la droite, voire l’extrême droite.
Un seul mot d'ordre : fustiger mai 68 et ses acquis culturels. <




Source : J. CASSAGNE / 20 MINUTES


>> Plus de détails et de photos sur le site de 20 minutes


>> L'article du NouvelObs.com

>> Le site de manifdedroite.com
Partager cet article
Repost0
15 juin 2007 5 15 /06 /juin /2007 12:55
Selon des informations convergentes, il semble que la police nationale redouble de zèle dans les bus de l’agglomération d’Orléans pour y effectuer des contrôles d’identité. Objectif : « dénicher » -pour ne pas dire autre chose - les sans-papiers ! Histoire, sans doute, de faire grimper le chiffre des reconduites à la frontière. Les quotas sont les quotas. A un « contrôlé » qui s’en étonnait, un policier aurait répondu : « On applique la nouvelle loi Sarkozy » (sic).
Bien entendu, inutile de préciser que, compte tenu de la population visée, les contrôles se font « au faciès ». <
Partager cet article
Repost0
11 juin 2007 1 11 /06 /juin /2007 22:41
Au bureau 39, à l'Argonne le 10 juin 2007Ils ne sont plus là. Tous ces jeunes qui, les 22 avril et 6 mai, dans les quartiers populaires (comme dans le bureau 39 d’Orléans que je présidais), sont venus voter (Ségolène Royal en grande majorité), ces jeunes-là, hier, ont disparu de l’écran électoral. Fin de partie.
Le « sursaut démocratique » tant glorifié a fait long feu. Il n’a résisté ni au rouleau compresseur médiatico-sarkozyste, ni à la déception paralysante de la victoire de Sarkozy, ni probablement à une méconnaissance de nos institutions, ni sans doute aussi, il faut bien le reconnaître, à un certain cafouillage à la tête du parti socialiste.
  
S'agissant d’Orléans, compte tenu du fort taux d’abstention (35 % de participation dans le bureau 39, contre plus de 70 % au 2e tour de la présidentielle, ce qui était, il est vrai, exceptionnel pour ce bureau), les résultats sont, évidemment moins encourageants que ceux de la présidentielle.
Nous pouvons néanmoins nous réjouir d’avoir au moins contribué à éliminer Montillot.
 
Au delà, ces deux élections successives confirment des convictions personnelles qui, je le sais sont partagées par d’autres :
- Lionel Jospin aurait dû, dès 1997, redécouper la carte électorale française, héritage du « charcutage » à la Pasqua ;
- L’inversion du calendrier électoral n’était pas forcément une bonne idée ;
- Il faut absolument instiller de la proportionnelle dans le mode d’élection des députés ;
- Enfin et surtout, qu’on le veuille ou non, nos institutions, alliées à un système médiatique ultra puissant, sont gangrenées par le mode de désignation du président de la République. L’élection au suffrage universel direct du chef de l’Etat concentre tout le jeu médiatique, tous les pouvoir sur ce dernier, au détriment du Parlement.  <
Partager cet article
Repost0
11 juin 2007 1 11 /06 /juin /2007 22:35
 
Quand Sarkozy trinque avec le russe Poutine.

Une vidéo autocensurée par la télévision française

Consternant.
Partager cet article
Repost0
25 août 2005 4 25 /08 /août /2005 13:29

C’est comme un vieux refrain usé. Régulièrement, quand il n’a pas grand chose à proposer d’autre, il y a un ministre de l’Education nationale sort de son chapeau l’introduction de La Marseillaise à l’école. Comme un remède miracle à toutes les faiblesses de notre système éducatif. Pour un peu, on en ferait bien le seul point au programme du cours d’instruction civique.
Tant pis si l’on ignore parfois les droits les plus élémentaires des élèves à l’école, lieu essentiel d’apprentissage de la démocratie. Avec La Marseillaise à l’école, on va voir ce qu’on va voir, ou plutôt, on va entendre ce qu’on va entendre. Imaginez un peu : de Lille à Marseille, de l’établissement le plus côté à l’école ghetto de ZEP, tous, blacks-blancs-beurs, comme sur la pelouse de Stade de France, entonnant d’une seule voix notre hymne national ! ce sera beau et émouvant. Je le dis tout net : pas question que mes enfants soient ainsi embrigadés. Pas principalement parce que c’est un hymne national (encore que je me méfie, à l’heure de l’Europe, de ces vieux réflexes un tantinet nationalistes) mais à cause des paroles de ce « chant de guerre de l'armée du Rhin ». Chacun les connaît : « Qu’un sang impur abreuve nos sillons » ! Et puis quoi encore ? Pourquoi pas faire la guerre en Irak tant qu’on y est ? Non, pas question de mettre ces paroles guerrières et sanglantes dans la bouche de mes enfants. Si l’on doit apprendre un hymne à nos enfants, choisissons plutôt l’hymne européen, L’Ode à la Joie de Beethoven. <

 
Partager cet article
Repost0
18 août 2005 4 18 /08 /août /2005 16:12
C’est un coup dur. Un gros coup dur. Comme à chaque fois que, comme militant, j’ai, avec d’autres, battu la campagne électorale et que la victoire n’est pas au bout de tant d’efforts.
Mais, bien entendu, cette « gueule de bois » électorale ne serait pas grand chose s’il n’était le résultat lui-même : une grande claque. Un sentiment de gâchis. Le sentiment d’avoir manqué un tournant historique.
Quel triste spectacle que de voir, au soir et au lendemain de ce scrutin, Le Pen pavoiser, la presse conservatrice britannique applaudir, et les milieux financiers internationaux se rassurer.
Les partisans du non de gauche, après avoir, avec des mensonges, dérouté une opinion publique déjà fortement déstabilisée, tente aujourd’hui d’accréditer l’idée que ce non massif serait un non à la Constitution. N’ai-je pas entendu, dans une rencontre-débat de l’ACO consacrée à cette Constitution, quelqu’un croire – ou tenter de faire croire ? – que notre propre Constitution de la Ve République serait abolie par la ratification du Traité européen !
 
Une étape siginificative. Pour ma part, toutes les heures passées à distribuer des tracts ou à discuter avec les passant dans la rue, je les ai vécues avec conviction. J’ai, personnellement, fait d’abord et essentiellement campagne, non pas contre le non, mais pour le oui. Parce que, comme militant, comme chrétien, comme père de famille, je crois profondément que cette Constitution marque une étape significative dans l’histoire récente de la construction européenne. Non pas par calcul politicien, par fidélité à telle ou telle écurie, ou pour faire le jeu de je ne sais quel leader socialiste. Non j’ai soutenu ce texte et milité pour, parce qu’il constitue une avancée démocratique, sociale, politique, vers une Europe plus juste et plus solidaire.
 Reste que le « non » l’a emporté. Comme un coup de semonce. Ou un coup de point sur la table. Essayez de taper du poing sur la table et de dire « oui ». Quand on tape du point sur la table, on dit non, instinctivement, naturellement. Nos concitoyens, et les plus pauvres, les plus exploités, les plus perdus, les plus désemparés d’être eux ont voulu, à cette occasion, exprimer leur ras le bol.
D’une certaine manière, c’est, avec un taux de participation encore supérieur, la répétition de la claque prise par la droite aux régionales et, dans une moindre mesure, une réplique du séisme du 21 avril 2002. Le vote était déjà, pour une grande part, un vote de contestation. Que la gauche réunie a su, en avril 2004, transformer en espoir. Le 29 mai, la désunion de la gauche a transformé le ras-le-bol populaire en un coup d’arrêt à la construction européenne.
 
Pas de plan B. Car ceux qui ont osé faire croire que le « non » était le chemin de l’espoir devront assumer cette lourde responsabilité quand les électeurs se rendront compte qu’il n’y a pas de plan B, il n’y a pas, dans des délais raisonnables, de renégociation possible.
J’en arrive à penser que le désarroi des classes populaires est si fort que le non aurait pu l’emporter sans le « non » de gauche. C’est dire si ce « non » populaire n’est pas d’abord un « non » à la Constitution, ni un « non » à l’Europe. Si l’on avait pu organiser deux référendums parallèles, un « pour ou contre la Constitution », l’autre « pour ou contre Chirac-Raffarin », il y a fort à parier que le Traité européen eut été ratifié et Chirac renvoyé en Corrèze.
Au delà, les trois derniers scrutins nationaux organisés en France révèlent une terrible réalité qui prend racine dans une société incapable de juguler le chômage et la précarité : nos concitoyens, dans leur majorité, de plus en plus, votent par désespoir. Un mal vivre qui laisse désemparés de nombreux militants, associatifs, syndicaux, politiques.
 
Le coup du décalage. Dès le soir ou le lendemain de l’élection, les bonnes âmes du « non », Laurent Fabius en tête, qui savent eux, ce qu’est la vraie vie, nous ont fait le coup du décalage. Nous n’aurions pas su écouter. Nous aurions été, nous, partisans du « oui de gauche » sur une autre planète, loin des préoccupations des vrais gens. Tandis que, éclairés par la lumière du « non », étaient sur le terrain. Il savent eux, ce que veut le peuple. Ils savent eux ce qui est bon comme le peuple. Comme quand Laurent Fabius ministre de l’Economie et des Finances réduisait les impôts des classes moyennes et supérieures. Comme quand il manquait les deux voix d’extrême gauche au Parlement européen pour faire adoptée la « Taxe Tobin » pourtant si chère à … ATTAC.
L’erreur n’est pas d’avoir voté oui – « être de gauche, écrit Aurélien Chevallier sur le site « Réformer » de Martine Aubry, ce n’est pas forcément choisir la facilité de la protestation, mais c’est voir loin et agir ensemble pour appliquer des solutions ». Non, si faute il y a, c’est de ne pas avoir mesuré l’ampleur du décalage. Notre campagne, dans sa forme et son intensité, n’était sans doute pas à la hauteur, pas adaptée à ce décalage.
 
Mais sur le fond, si c’était à refaire, je referai campagne pour le « oui ». Car j’ai milité pour le « oui » en conscience. Et j’ai essayé d’expliquer ce texte, de faire partager mes convictions. Si décalage il y a, il n’est pas entre des militants du PS qui seraient déconnectés de la réalité et une classe populaire qui souffre, mais entre une question - oui ou non à la constitution - et la manière dont on y a répondu : non à Chirac-Raffarin, non à la galère, non au lundi de Pentecôte travaillé, non à ma cité ghetto, non à mon salaire qui stagne, non au chômage de mon fils, non au budget de la recherche, non à la loi Fillon, non au non à la Turquie, non à mon numéro sur la liste d’attente des attributions de logement social, non à l’euro que je paie désormais pour chaque consultation médicale, non à l’usine qui ferme… Autant de raisons de râler, de s’insurger, de revendiquer, de manifester. Mais pas de voter « non ».
 
Le Oui de gauche. Le choix du « oui » (je veux dire de faire campagne pour le « oui ») était, à mon, sens, un choix plus courageux, plus conforme en tout cas à l’idée que je me fais, comme socialiste, de la solidarité internationale et de la coopération entre les peuples. Il est plus facile de faire campagne contre avec des discours simplistes voire mensongers, que pour avec des idées progressistes.
Je suis fier d’avoir milité pour le Oui de gauche, avec tous les autres partis socialistes et démocrates sociaux d’Europe, avec la Confédération européenne des syndicats. Je suis fier d’avoir défendu une certaine idée de l’Europe qui a su, après l’horreur des deux guerres mondiales, construire un espace de paix. Je suis fier d’avoir défendu un texte qui constitue un progrès indéniable pour tant d’hommes et de femmes en Europe, à commencer par les plus pauvres d’entre eux. Je suis fier d’avoir dit « oui » aux vingt quatre autres peuples d’Europe, « oui » pour poursuivre l’aventure commencée il y a 50 ans, « oui » à plus de solidarité entre les peuples d’Europe. Pour tout cela, je n’ai pas le sentiment d’avoir trahi mes convictions socialistes, ni le peuple de gauche.
Je suis fier d’avoir activement participé à une campagne qui a réveillé notre démocratie. Sans doute le choix d’un référendum était-il risqué. Mais tant à l’intérieur du parti d’abord que dans la rue ou les meetings ensuite, le débat avec les citoyens a été passionnant. Bien sûr, certains, sans connaître les engagements de chacun, ou en feignant de ne pas les connaître, voire en les méprisant, nous ont accusé des pires arrière pensées : faire, avec toutes les autres forces progressistes d’Europe, le jeu des ultralibéraux.
 
Il y a, dans le film sur les débuts politiques de Jean Jaurès (Jean-Jaurès, naissance d’un géant de Jean-Daniel Verhaeghe) récemment diffusé à la télévision, une scène qui m’a particulièrement marqué. Elle se déroule au moment de la désignation, par les différentes forces de gauche pour une fois réunies, du candidat de la gauche aux élections législatives pour la circonscription de Carmaux. Le discours de Jaurès est clair : le clivage est entre ceux qui pensent qu’il faut changer l’homme pour changer la société et ceux qui considèrent au contraire qu’il est nécessaire de changer la société pour changer l’homme. Entre les réformistes et les adeptes de la « rupture », j’ai choisi depuis longtemps. Impossible de changer notre société si les hommes et les femmes qui la composent ne sont pas totalement partie prenante. Cela vaut, bien évidemment, pour l’Europe. <
Partager cet article
Repost0
1 juillet 2004 4 01 /07 /juillet /2004 15:10
« Les prisons françaises sont de plus en plus criminogènes », annonçait un jour sur France Inter un journaliste à la suite de quelques-uns des faits divers sordides qui ont défrayé la chronique au début de l'été dernier. Une nouvelle alarmante qui n'a pourtant rien de nouveau. Depuis longtemps, et encore plus depuis le retour en force d'un discours sécuritaire, on enferme, on incarcère, sans trop se préoccuper - ou presque - de ce qu'il advient des hommes, pour l'essentiel, et des femmes que l'on met derrière des barreaux, dont la moitié a peu près est constituée de prévenus, c'est à dire de prisonniers en attente de jugement et donc, présumés innocents.
Faute d'une prise en charge médicale, sociale, professionnelle ou psychologique adaptée, un grand nombre de détenus ressortent de prison « pire » qu'à leur arrivée. Car, outre la seule privation de liberté, beaucoup d'entre eux auront vécu au sein de l'institution carcérale - même à l'occasion de courtes peines -, des conditions de vie indignes de la personne humaine : vexations répétées, brimades et sanctions arbitraires, viol, promiscuité, manque d'hygiène, suivi médical déplorable, violence, drogue. Il n'est qu'à lire les très instructifs et très documentés rapports réguliers de l'Observatoire International des Prisons (OIP) pour se rendre compte à quel point nos prisons sont, dans de très nombreux cas, des lieux de déshumanisation. Beaucoup de détenus « vivent » à trois voire quatre, dans des cellules prévues pour accueillir deux personnes. Avec une cuvette de WC que l'on doit utiliser sous le regard des autres et le droit de se doucher une ou deux fois par semaine seulement.
À traiter certains hommes comme des bêtes, ils finissent le devenir, en perdant une bonne part de leur humanité.

Plus on en construit, plus on enferme. Qu'on ne s'y trompe pas : en disant cela, je n'incrimine pas particulièrement les hommes et les femmes qui travaillent dans les prisons françaises. La majorité d'entre eux font ce qu'ils peuvent avec les moyens qu'on leur donne. Non, la responsabilité se situe ailleurs. À commencer par ceux qui mettent les gens en prison. En juin dernier, tous les parlementaires français étaient invités par l'OIP à aller visiter, à l'improviste, une prison de leur circonscription ou de leur département. Un certain nombre d'entre eux l'ont fait, comme Jean-Pierre Sueur, le sénateur pour lequel je travaille, qui s'est rendu à la prison d'Orléans. Il a constaté et déploré une nouvelle fois – ça n'était pas la première fois qu'il y allait - un taux d'occupation de plus de 200 %. Mais combien ont décliné la proposition ? En 2002 déjà, une mission d'enquête parlementaire avait relevé les très graves dysfonctionnements, concernant les mineurs en particulier, de notre système carcéral. Une fois passée l'émotion qui a suivi la publication de leur rapport, rien n'a changé, bien au contraire. Les prisons continuent de se remplir. Plus on en construit, plus on enferme.

Abolition de la prison. Je rêve d'une société qui rendrait obligatoire un « séjour » en prison pour tous ceux qui ont la lourde responsabilité d'y faire incarcérer - et aussi d'y faire travailler - des hommes et des femmes : législateurs, policiers, juges. Sans doute certains prendraient-ils un peu moins à la légère un certain nombre de décisions, sans trop se soucier ce qu'il adviendra, un jour, de ces êtres humains qu'on enferme et puis qu'on oublie presque le temps de leur détention. Car c'est bien là, selon moi, le fond du problème. Dans nos sociétés dites évoluées, développées, la prison reste la sanction appliquée quasiment « par défaut », parce que l'on ne sait pas ou l'on veut pas faire autrement. Alors je rêve encore. Je rêve d'un homme ou d'une femme politique, de la trempe d'un Jean Zay par exemple, qui serait le « Badinter de l'abolition de la prison ». Je pèse mes mots. On ne peut pas, on ne peut plus, si tant est que l'on croie en l'Homme, se contenter d'un statuquo lâche et irresponsable. Car non seulement notre société a prouvé qu'elle était incapable, par la prison, de régler les problèmes qu'elle est censée résoudre, mais que, de surcroît, elle les aggrave. Je fais partie de ceux qui pensent qu'une refonte de notre système punitif constituerait une avancée considérable vers une société plus humaine. Plutôt qu'un secrétariat d'État chargé du programme immobilier de la justice (un des gadgets sécuritaires de Raffarin II), créons un ministère de la réforme de notre système punitif. Mettons autour d'une table, pendant tout le temps qu'il sera nécessaire, des hommes et des femmes concernés par la question. Étudions les solutions alternatives mise en œuvre dans d'autres pays. Et inventons, ayons le courage politique d'inventer des peines qui laissent aux condamnés toute leur dignité, qui témoignent de notre foi en la rédemption de l'être humain. Notre société en sortira grandie, plus juste, plus humaine, plus fraternelle, plus sûre aussi.

>> Article publié dane le numéro 503 de juillet-septembre 2004 de la revue Les Cahiers de l'Atelier
Partager cet article
Repost0

Profil

  • Pascal Martineau
  • Journaliste de métier, collaborateur parlementaire, écrivain public-biographe, j'aime les mots.
  • Journaliste de métier, collaborateur parlementaire, écrivain public-biographe, j'aime les mots.

logo ecrivain 

Découvrez mon activité d'écrivain public agréé

 

Président de  l'Academie des écrivains publics de France

Recherche

Le temps qui passe

Archives

Faites connaître mon blog

J'invite les lecteurs occasionnels ou réguliers qui ne sont pas encore abonnés à le faire ("Recevoir des alertes" ci-dessous). Vous serez ainsi automatiquement informés de la publication d'un nouvel article. Le désabonnement est aussi simple que l'abonnement.

J'invite celles et ceux qui sont déjà abonnés - et je les en remercie par avance - à faire connaître mon blog en utilisant le module "recommander ce blog" ci-dessous.